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Retour de Kolingba: un test pour la réconciliation en RCA

LIBREVILLE, 6 oct (AFP) - 9h17 - Le retour d'exil de l'ancien président André Kolingba (1981-93) constitue un test de taille pour la réconciliation en Centrafrique, déchirée par les crises politico-militaires depuis 1996.
Auteur d'un putsch manqué, en mai 2001, contre son éternel adversaire politique, le président déchu Ange-Félix Patassé (1993-mars 2003), André Kolingba est rentré dimanche à Bangui, après 28 mois d'exil en Ouganda.

A 67 ans, ce général d'armée, membre de l'ethnie minoritaire Yakoma, continue de susciter crainte et méfiance dans la capitale centrafricaine, où la sécurité a été considérablement renforcée un mois avant son retour.

Le président Patassé, renversé lors d'un coup d'Etat le 15 mars dernier par le général et actuel président François Bozizé, a souvent accusé M. Kolingba d'avoir été l'instigateur des mutineries militaires de 1996-97. Ce que l'interessé a toujours démenti.

Il a fallu de longs mois de négociations en dents de scie avec le régime de transition instauré par François Bozizé pour persuader André Kolingba de rentrer à Bangui, où toutes ses résidences ont été rasées en 2001.

Son retour coïncide symboliquement avec la tenue à Bangui du Dialogue national de réconciliation, auxquels participent depuis la mi-septembre 350 délégués issus de toutes les couches socio-politiques du pays.

Ces assises, voulues par la communauté internationale, visent à mettre un terme aux divisions qui ont plongé ce pays pauvre d'Afrique centrale de 3,7 millions d'habitants dans un cycle de troubles politico-militaires.

L'entourage de M. Kolingba avait fait savoir, lors des semaines ayant précédé son retour, que l'ancien chef d'Etat souhaitait y participer pour délivrer un "message de paix". Ce qu'il devrait faire en début de semaine.

Se disant "ému de rentrer dans mon pays qui m'est si cher", André Kolingba s'est voulu rassurant, dimanche soir, à son arrivée à Bangui.

Il a remercié "le président Bozizé" et son gouvernement de l'avoir "fraternellement encouragé à rentrer". "Je suis venu témoigner mon adhésion à l'oeuvre qu'ils sont en train d'accomplir et leur apporter ma petite contribution", a-t-il dit.

Le général Kolingba doit pourtant s'attendre à affronter les critiques des délégués du Dialogue national. La semaine dernière, ces derniers ont fustigé l'attitude de tous les chefs d'Etats qui se sont succédés à la tête du pays après son fondateur, Barthélémy Boganda.

Ils ont reproché à M. Kolingba d'avoir introduit "une dimension ethnique et familiale" dans la gestion de l'Etat, notamment au sein de l'armée, où les Yakomas, ethnie riveraine du fleuve Oubangui, étaient surreprésentés.

Après son putsch manqué de mai 2001, les membres de cette communauté avaient fui par milliers vers les deux Congo la répression des forces loyalistes

M. Bozizé, un nordiste comme M. Patassé, dont il fut longtemps le chef d'état-major, a multiplié les signes d'apaisement ces derniers mois envers M. Kolingba, en l'amnistiant pour son putsch manqué et en le rétablissant à son grade de général d'armée.

En 1989 pourtant, le président Kolingba avait fait enlever M. Bozizé, alors exilé à Cotonou, (Bénin), par un commando embarqué à bord d'un avion zaïrois, avant de le faire emprisonner à Bangui pendant deux ans.

Aujourd'hui au pouvoir, M. Bozizé assure avoir pardonné, prouvé sa "bonne foi" et sa "disponibilité" en permettant le retour d'exil de M. Kolingba.

"A lui maintenant de savoir saisir cette main tendue", avait déclaré à l'AFP le président Bozizé, le 21 septembre. Avant de s'interroger: "Est-il capable d'ouvrir son coeur? N'a-t-il pas d'arrières pensées? Vient-il sincèrement contribuer à la reconstruction de la RCA qui a tant souffert?"

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